Où on va papa ? / Jean-Louis Fournier

Où on va papa ? / Jean-Louis Fournier.—Paris : Stock, 2008. 154 p.

Citations de Jean-Louis Fournier. Conseils de lecture de l'œuvre de Jean-Louis Fournier : Il n'a jamais tué personne mon papa ; Je ne suis pas seul à être seul ; Le CV de Dieu ; Trop.
















Récit-témoignage d’une parentalité peu ordinaire : celle de deux fils mongoliens.
Un troisième enfant naîtra, Marie, «normale», sans handicap.
A l’école, en parlant de sa famille à ses camarades, elle se verra accusée de vantardise, quand elle leur avouera qu’elle est la sœur de deux frères handicapés.

Absurde monde de l’enfance, où cette situation rare d’une famille composée d’un duo d’enfants handicapés serait un moyen de se mettre en avant.
Tout le contraire du sentiment du père, Jean-Louis Fournier, qui a eu honte de sa progéniture, et leur consacre cet essai plutôt tardivement, comme pour endosser le rôle du «bon père», ou plus exactement du père, tout simplement, en mettant un peu de lumière sur ses enfants, maintenant qu’il s’y sent prêt.

Ce témoignage est touchant, bouleversant, et rempli d’amour.
Pourtant, la déception ressentie au diagnostic médical des deux handicaps des enfants n’est pas dissimulée ; comme le regret d’avoir dû renoncer à tout partage, discussion, transmission avec ses enfants.

Jean-Louis Fournier aime ses fils, ce livre ne laisse planer aucun doute là-dessus. Mais, il les aurait aimés différents, «normaux», intelligents et capables de progression, d’évolution.
La déception qui plane dans ces pages est donc naturelle.

Jean-Louis Fournier n’est pas un ange, et comme tout parent en attente de son premier enfant, il nourrissait des rêves, auxquels il a dû renoncer, à deux reprises.
Sa culpabilité de les avoir mis au monde, et de leur avoir donné CETTE vie-là est latente.

Beau témoignage d’un amour paternel, dans des circonstances très particulières.
Jean-Louis Fournier aurait-il plus aimé ses fils, s’ils n’avaient souffert d’aucun handicap ? Rien n’est moins sûr !

Cet essai avait reçu le Prix Femina en 2008. Cette récompense était largement méritée.
Sur un sujet aussi difficile, Jean-Louis Fournier se paie le luxe de nous faire sourire.
Son livre regorge d’humour, de légèreté avec une dédramatisation et un recul impressionnants. Cet ouvrage se lit avec beaucoup de plaisir.

L’humour sauve de toutes les situations. Jean-Louis Fournier a gardé la tête hors de l’eau grâce à cette qualité qui l’habite et par laquelle il s’est fait connaître.
Grand ami de Pierre Desproges, il partage ce talent décalé et étonnant de se moquer de ce qui le meurtrit. Desproges se moquait du cancer, disait qu’il était contre, alors même qu’il en était atteint.

Jean-Louis Fournier décrit les faiblesses, les limites de ses enfants handicapés, sans aucune tentation de passer pour un homme dévoué, dans le pur sacrifice. Il fait plutôt le choix de la vérité.
Il parle au lecteur de sa vie telle qu’elle s’est déroulée, avec sincérité. Il ne cache rien des peines, des douleurs, des regrets ressentis, ni des difficultés.

Et cette écriture naturelle et vraie est une plongée dans un monde d’amour et d’attachement. Ce tendre récit se lit avec beaucoup d'émotion.

(c) Véronique Meynier, le 02/12/2013



Sur le même sujet, lire aussi "J'aime avoir peur avec toi" de Catherine Chaine.

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